L’humanisme biologique : entre naturopathie, politique et spiritualité

Introduit durant les années 1960, le concept d’humanisme biologique, ou de bio-humanisme, accompagne la promotion d’un autre concept, celui de naturopathie, principalement diffusé en France par l’intermédiaire de Pierre Valentin Marchesseau (1911-1994). Si le concept de naturopathie n’est pas une invention de ce dernier, qui ne fait que le traduire et l’adapter avec succès auprès du public français, celui d’humanisme biologique, en revanche, semble avoir été principalement forgé par lui. Il n’a cependant pas connu la postérité de son homologue. Aucun article journalistique ne s’inquiète ou s’étonne aujourd’hui des risques ou de l’essor de l’humanisme biologique ; et pour cause, il ne semble être encore aujourd’hui promu que par une poignée de « marchessistes », fidèles à la pensée de celui qui aura formé les premières générations de naturopathes français. L’étude historique de ce concept révèle pourtant les représentations et les engagements du mouvement naturopathique français naissant, qui dépassent largement le simple cadre thérapeutique. Les significations évolutives de ce terme, qui ne touchent pas au seul niveau biologique, dénotent en effet un intérêt pour des domaines généralement situés en dehors de la sphère strictement médicale, du moins telle que cette dernière est conçue par la biomédecine1, en miroir duquel la naturopathie se développe. Après avoir pris le temps de présenter l’humanisme biologique tel qu’il apparaît de manière changeante au fil des années dans les publications rédigées par Marchesseau et ses collaborateurs, cet article s’attachera principalement à contextualiser ce à quoi il renvoie, dans sa double dimension diachronique et synchronique. Ainsi, les racines naturistes et culturistes de ce concept seront détaillées, puis son inscription au cœur du milieu écologiste naissant, également alimenté par les activités des promoteurs d’une agriculture sans engrais ni pesticides chimiques. Enfin, la dimension spirituelle de l’humanisme biologique sera discutée, en lien avec le développement concomitant du mouvement New Age.

L’humanisme biologique au fil des publications

La première occurrence du terme dans les publications périodiques dirigées par Pierre Valentin Marchesseau semble remonter à l’année 1964. Dans son éditorial, qu’il intitule « Cessons de faire les imbéciles », le natif de Bizerte dénonce les savants qui ne se soucient pas des conséquences de leurs actes et agissent comme des « apprentis sorciers » en bouleversant « l’ordre naturel ». Il préconise alors une réforme générale des modes de vie :

« Contentons-nous d’harmoniser notre comportement aux lois naturelles, respectons nos besoins physiologiques, transformons nos manières de vivre qui sont démentielles en pratiques saines et raisonnables, et organisons la Société sur cette base d’humanisme biologique, c’est là la meilleure des politiques et l’assurance que nous travaillons à la régénération physique et morale de notre race et que nous cessons… ENFIN ! … DE FAIRE LES IMBÉCILES2. »

Dans l’œuvre de Marchesseau, l’apparition du terme d’humanisme biologique est somme toute assez tardive. L’homme est déjà âgé d’une quarantaine d’années et s’occupe d’éditer des revues de santé depuis près de quinze ans. Cela fait ainsi dix ans qu’il contribue à promouvoir le concept de naturopathie, d’abord présenté comme un synonyme d’hygiène et médecine naturelles. Cependant, cette volonté de réformer la société sur la base d’un certain humanisme n’est pas nouvelle. Dès 1950, Marchesseau se félicite qu’un « nouvel humanisme [soit] né » avec le lancement d’Académos. Cette revue est présentée comme l’organe de « l’Académisme, œuvre de renaissance humaine », une association qu’il constitue afin de mettre en place un ambitieux programme en trois volets : « Perfectionner l’Homme – Harmoniser la Société – Humaniser le Monde ». S’il n’est pas encore question d’un « humanisme biologique », les ambitions sociales et politiques de Marchesseau sont quant à elles déjà explicites. Cependant, le concept d’académisme, qui visait donc à un « perfectionnement intégral de l’être humain » sur les plans physique, intellectuel et moral, puis à des réformes sociales et universelles, cesse subitement d’être employé par son auteur dès 1952. Celui d’humanisme biologique sera plus pérenne et véritablement adossé à l’enseignement naturopathique.

Entre 1966 et 1968, Marchesseau se décide à restructurer et formaliser la doctrine sur laquelle s’adosse son mouvement, et à l’exposer plus clairement à ses lecteurs. La naturopathie devient ainsi une doctrine médicale faisant appel à dix agents thérapeutiques principaux : aliments, plantes, bains, exercices, manipulations, gaz, réflexes, radiations, fluides et idées, et par conséquent à une myriade de méthodes hygiéniques et thérapeutiques mettant au travail ces agents. Le 13 mars 1966, la Société Française de Naturopathie (SFN) est fondée. Elle fait suite à la Société Française d’Hygiène et de Médecine Naturelle, dissoute l’année précédente et dont la fondation remontait à 19553. Dans le même temps, les références à l’humanisme biologique se font plus nombreuses et renvoient « au devoir […] de comprendre les grandes formes de la vie et d’en respecter les équilibres4 », qui s’exprime « dans ce que nous appelons la Bio-Politique (art d’organiser la société en fonction de ce perfectionnement intégral de l’Être humain par le retour à son milieu biologique, à défaut l’application des éléments naturels qui le caractérisent5 […]) ». Pour Marchesseau, « notre civilisation marche à rebours », car rien n’est fait pour « protéger la vie et la santé6 ». Il ne s’agit alors plus seulement de se soigner par l’application des agents hygiéniques et thérapeutiques naturels dans le cadre de la naturopathie – qui repose par ailleurs sur d’anciennes conceptions médicales vitalistes et humoristes (de la théorie des humeurs) : « Face au processus mystérieux des forces qui nous animent, il faut repenser l’existence humaine dans le cadre de notre Humanisme biologique, et d’une “socio-politique” qui s’en inspire7. » C’est en ce sens que la Société Française de Naturopathie devient, en avril 1969, la Fédération Française de Naturopathie, d’Humanisme et de Sociologisme Biologiques8, preuve de l’importance de ce concept dans la pensée marchessienne. Ce changement de nom fait suite aux vœux exprimés par Marchesseau lors des assises de la SFN, qui s’étaient tenues en septembre 1968 et à l’occasion desquelles il s’était prononcé « en faveur de l’extension de la SFN en un Ordre Culturel débouchant sur le bio-socialisme, aspect politique de notre “Humanisme Biologique”, seule solution de survie dans ce monde en folie9 ». Les thèmes du IIIe Congrès international d’hygiène naturelle, de sociologie médicale et de bio-politique, organisé à Paris en octobre 1969 par les Fédérations française et européenne de naturopathie, nous renseignent alors sur le contenu de cette bio-politique. Seront en effet discutés les thèmes du sol, de la chimification des aliments, de la souillure des eaux, des pollutions atmosphériques, des méfaits de l’industrialisation et de la planète au pillage, mais aussi de « l’énervation du civilisé » (sa perte d’énergie vitale), de la surpopulation et des menaces de famine.

Afin d’apporter « un frein aux abus d’une civilisation scientifico-technique, matérialiste, grisée de ses succès et dangereuse pour l’homme10 », Marchesseau propose en 1970 de créer un véritable « Ministère de la vie », chargé « de sauvegarder les équilibres biologiques du milieu extérieur, qui nous conditionnent » et « desquels dépend, en fin de compte, la Santé Humaine11 ». Plus que la santé retrouvée par la préservation du milieu naturel, son projet politique espère « la paix sociale » et l’entraide entre les peuples, dans « l’amour et le respect des lois biologiques » et « hors des voies habituelles des conquêtes et des industries12 ». Face à l’urgence de la situation et l’intensité des pollutions, « le biologiste P. V. Marchesseau » appelle à passer à l’action dès maintenant, mais il faut attendre 1972 pour que ses ambitions se matérialisent au-delà des mots. En juillet de cette année, il lance une nouvelle revue, crânement intitulée La Vérité et présentée comme l’organe de l’Institut d’humanisme biologique et du mouvement social « bio-humaniste ». Ces deux nouvelles créations sont pensées comme complémentaires. Présidé par Alain Rousseaux (né en 1947), le nouveau jeune bras droit de Marchesseau, l’institut s’adresse à « ceux qui veulent travailler seulement sur le plan des idées et de la recherche scientifique13 ». Il s’agit de « vulgariser par des articles et des conférences la philosophie, la science et la technique de l’Humanisme biologique et de son prolongement dans le Sociologisme biologique (ou Bio-Politique)14 ». Le mouvement social, quant à lui, s’occupe concrètement d’action politique ; c’est du moins ce qu’annonce la revue.

Le parti bio-humaniste entend « présenter des candidats aux élections à tous les niveaux ». Marchesseau, qui le préside, le présente comme le parti « des contribuables, donc des mécontents ». La référence à Pierre Poujade (1920-2003), avec qui il partage le même dégout des « politicards affairistes », est même explicite. Si ce dernier a réussi à obtenir 52 députés, il en faudrait 300 pour faire changer les choses et permettre l’application de son programme, qui appelle à une réduction massive des impôts de toutes sortes, mais aussi, et surtout, à un arrêt de la pollution et du gaspillage des ressources naturelles. Parmi les buts essentiels qu’il annonce défendre, les statuts du parti bio-humaniste commencent en effet par déclarer leur ambition de « sauver la société actuelle, frappée à mort par l’industrialisation abusive et les pollutions15 […] ». Le journal alerte en outre sur les dangers du nucléaire, de la surpopulation mondiale et du déficit de la sécurité sociale française, en même temps qu’il appelle à revaloriser le travail ouvrier par la réduction massive des horaires et à sécuriser l’emploi par un système convenable de retraite. La stratégie populiste de Marchesseau est bien assumée, mais elle ne rencontre de toute évidence pas de succès, faute d’abord de candidats. Un seul disciple de Marchesseau, un certain Christian Brésillon, semble s’être présenté à une élection sous l’étendard du bio-humanisme, et seulement pour les législatives de 1978. Avec 3,24% des suffrages16, son slogan, « Ni à gauche ni à droite mais en avant », ne lui aura pas permis, à cette époque, de briser le clivage constitutif du paysage politique français. Brésillon proposait pourtant de porter remède aux « trois facteurs exterminateurs des sociétés humaines », la maladie, la misère et la violence, en passe d’achever la civilisation actuelle comme ils l’ont fait de celles du passé17. La référence aux trois grands fléaux médiévaux (épidémies, famines, guerres) est ici évidente, et Brésillon, ou plutôt faudrait-il dire Marchesseau, qui développait déjà ce thème en 197218, suggère en filigrane un retour vers le passé – ce qui entre d’ailleurs en contradiction avec son slogan politique. En effet, son affiche électorale invite d’abord à limiter l’allopathie aux seuls cas d’urgence et à « libérer la médecine » en favorisant le développement de la naturopathie, mais aussi à réduire la densité de la population (de moitié en un siècle) en luttant dans le même élan contre la technicité. Lutter contre la pauvreté, les maladies et la recherche de carburants permettrait alors de réduire drastiquement l’agressivité générale. Si cette aventure politique est sans lendemain – bien que Marchesseau ait ensuite tenté de se présenter aux présidentielles de 1981 –, l’humanisme biologique n’en demeure pas moins accolé au développement de la naturopathie durant le troisième tiers du siècle.

Il faut attendre la fin de l’année 1977 pour que paraisse un second numéro de La Vérité, un titre qui fait suite à Hygiène et médecine naturelles et dont la publication s’étendra jusqu’en 1982. L’emphase qui avait été mise sur l’humanisme biologique dans le premier numéro ressurgit alors, dès le sous-titre19. Dans son éditorial, intitulé « L’humanité a besoin d’un “garde-fou” », Marchesseau déclare : « Commençons donc, déjà, par respecter la Nature et la Vie, et nous aurons déjà fait un grand pas dans la voie du vrai progrès. » ; ce à quoi une note de la rédaction ajoute : « Il faut que tous les hommes s’imprègnent des notions de l’Humanisme Biologique ; cette philosophie est le “garde-fou de l’humanité”20. » Les enseignements du mouvement dirigé par Marchesseau sont également repensés. L’Institut d’hygiène naturelle, où sont enseignées les principales techniques de la naturopathie, côtoie désormais l’Institut d’humanisme biologique, dont il n’avait pas été fait mention depuis 1972. Ce dernier institut est présenté comme un « Centre d’études philosophiques et d’initiation à la sagesse traditionnelle » publiant quatre cahiers philosophiques par an qui suivent « un programme d’initiation » :

« Les travaux d’études passent par les degrés de “maître en humanisme biologique” 3e, 6e, 9e et 12e degrés. Des certificats d’investiture délivrés par l’“I.H.B.” sanctionnent les différents degrés d’initiation. Les recherches portent sur tous les problèmes humains (psychologie et parapsychologie, logique, esthétique, sociologie, morale, métaphysique, théologie, etc.) ; et répondent aux questions éternelles sur nos origines, notre rôle ici-bas et notre destinée. Elles règlent les rapports des hommes entr’eux [sic] et avec la création. Cette voie de l’initiation est celle du perfectionnement intégral. C’est un nouvel art de vivre par l’épanouissement individuel21. »

La revue répertorie en parallèle les différents « Centres d’Humanisme Biologique » où sont enseignées l’hygiène vitale (enseignement des lois de la santé, nutrition, sudation, respiration, hatha-yoga, etc.) et l’hygiène mentale (relaxation, oxygénation, méditation, etc.). Outre le centre national, situé à Paris, dix autres « centres » (qui renvoient aux activités de praticiens isolés) sont ouverts en province par des collaborateurs de Marchesseau, et la revue se fait incitative : « Créez dans vos villes des centres bio-humanistes » ; « Soyez les artisans de la Santé et de la Sagesse » ; « Contribuez à l’édification d’une humanité nouvelle dans un monde meilleur ». À la fin de l’année 1978, ce sont ainsi 32 centres qui sont répertoriés, dont quatre situés à l’étranger (Suisse et Portugal), puis 48 à la fin de l’année 1979 (six localisés à l’étranger) et 57 en 1980 (neuf à l’étranger)22. Dans le même temps, tandis que le Congrès de naturopathie et d’humanisme biologique de 1978 accueille supposément 3 000 visiteurs, plusieurs articles s’occupent de présenter, avec quelques variations, la signification et les buts de l’humanisme biologique : « Il s’agit d’une philosophie nouvelle de l’existence où l’homme est repensé en fonction de sa vraie nature physiologique, de ses origines, de ses liens étroits avec son milieu biologique, de ses rapports avec la société et de sa finalité23. » Elle « tend à faire des hommes nouveaux dans un monde meilleur, fait à leur mesure », et prend pour devise : « Il faut repenser l’humain en fonction du Naturel et repenser le Social en fonction de cet humain retrouvé24. » C’est aussi une « nouvelle conception de l’homme et de ses épurations successives : corporelles, affectives et intellectuelles pour atteindre [sic] à la libération et à l’expression de sa personnalité morale et spirituelle, gage d’une société meilleure et d’un monde pacifié, de sagesse et d’amour ; et remplir pleinement son rôle sur terre en fonction de ses origines et de sa finalité25 ». On le voit, l’humanisme biologique dénote à cette période une dimension spirituelle plus assumée, qui semble avoir accompagné le mouvement jusqu’au décès de Marchesseau dans les années 199026, nous y reviendrons. Pour autant, la dimension non seulement politique mais politicienne n’a pas disparue, comme en témoigne un éditorial de Marchesseau intitulé « Si j’étais candidat à la présidence », dans lequel il expose son programme qui « repose sur les principes de l’Humanisme Biologique27 ».

Livret publié en 1974, réédité en 1980.  BnF

Livret publié en 1974, réédité en 1980.

Photographie de la tribune du Congrès de naturopathie et d’humanisme biologique de 1978. La flèche indique le président d’honneur de la FFN, un certain Alexandre Bayait, à sa gauche se trouve Pierre-Valentin Marchesseau. BnF

Photographie de la tribune du Congrès de naturopathie et d’humanisme biologique de 1978. La flèche indique le président d’honneur de la FFN, un certain Alexandre Bayait, à sa gauche se trouve Pierre Valentin Marchesseau.

Des racines naturistes et culturistes

À première vue, l’humanisme biologique de Marchesseau semble être un « ovni culturel », un concept inclassable qui s’affranchit des frontières du médical, du politique et du religieux. Pour autant, l’humanisme biologique s’inscrit bien à la fois dans une histoire et dans un contexte, ou plutôt des contextes, changeants, qui se révèlent avec particulièrement d’acuité à la lumière de son étude. Si la sincérité de son engagement, notamment en faveur de la protection de la nature, pourrait être remise en cause au regard de ses besoins économiques et sa volonté d’attirer de potentiels disciples/clients, les domaines traversés par Marchesseau au nom de l’humanisme biologique reflètent ainsi malgré tout les intérêts populaires du moment.

Les textes de Marchesseau se nourrissent en premier lieu du mouvement naturiste, « ce vaste projet de réforme des modes de vie par le retour à la nature qui émerge en France à l’aube du XXe siècle28 », dans le sillage de la Lebensreform. Le naturisme français d’entre-deux-guerres possède une forte dimension médicale qui doit beaucoup à l’œuvre respectée du Dr. Paul Carton (1875-1947). La doctrine cartonienne, que son auteur présente comme « la médecine naturiste traditionnelle », postule ainsi dès 1917 que « les causes premières et véritables de l’état de santé et de toutes les maladies doivent être recherchées avant tout dans des faits d’obéissance ou de désobéissance ou de désaccord avec les lois naturelles qui guident la vie et l’évolution humaines29 ». Pour lui, « toutes les guérisons spontanées ou provoquées le sont invariablement par l’intermédiaire des réactions naturelles médicatrices » stimulées par « les moyens diététiques et hygiéniques naturels » qui constituent « l’essentiel de toute thérapeutique30 ». En France comme à l’étranger, Carton n’est pas le seul auteur à défendre pareil postulat, mais sa renommée, enrichie par Corps et âmes (1943), l’ouvrage à succès de Maxence Van der Meersch (1907-1951), est particulièrement notable. Il n’est à ce titre guère étonnant de le voir régulièrement cité dans les publications de Marchesseau après-guerre. La rédaction d’Hygiène et médecine naturelles considère d’ailleurs que « l’enseignement cartonien rejoint sur bien des points majeurs celui de la Naturopathie » et qu’il s’agit d’une « somme inestimable31 ». D’autres médecins naturistes célèbres à leur époque servent également de références à Marchesseau et ses collaborateurs. C’est le cas des frères Gaston (1887-1971) et André Durville (1896-1979), deux médecins fortement influencés par Carton qui s’étaient notamment distingués par la création des « cités naturistes » de Physiopolis (sur l’île de Platais près de Paris) et d’Héliopolis (sur l’île du Levant près de Toulon). Ces deux lieux de villégiature ont joué un rôle essentiel dans la diffusion d’un naturisme de loisir, animé par des activités physiques et de détente en plein air (intégralement nu ou non32). Le jeune Marchesseau avait d’ailleurs publié dans Naturisme, la revue à succès des frères Durville. Dans cet article particulièrement instructif daté d’avril 1937 et intitulé « La tâche du naturisme », il appelle à la synthèse et à l’union des différentes courants naturistes :

« Sports, éducation physique, culture physique, danses rythmiques, naturisme, nudisme, scoutisme, végétarisme, etc., autant de méthodes variées ayant pour but de régénérer l’individu et de le replacer totalement ou partiellement dans les conditions de vie et de milieu qui sont spécifiquement les siennes, qu’il n’aurait pas dû abandonner, et qu’il a perdues progressivement depuis la naissance des grandes villes. […] Le naturisme est un effort de généralisation […] conduisant à donner à tout homme une vue d’ensemble des pratiques naturelles, une notion philosophique d’éducation corporelle. […] sa tâche consiste à harmoniser les méthodes de régénération physique les unes par rapport aux autres, et à en tirer des règles de conduite et des principes de vie. C’est une synthèse, indispensable à notre époque, qui, loin des basses querelles de la politique et des mesquines jalousies de la vie, doit aider à mieux vivre, à lutter contre la maladie, à faire régner sur la terre et dans le sein de notre société moderne la confiance et l’amour, l’équilibre et la justice, la santé et la force, la beauté et le bonheur33. »

À cette époque, Marchesseau est un professeur d’éducation physique, mais aussi un culturiste qui collabore, sous le pseudonyme de « Pierre de Bizerte », à La Culture physique. Cette revue figure parmi celles fondées par Edmond Desbonnet (1868-1953), à la tête d’un véritable réseau de salles dédiées à l’apprentissage de sa méthode de culture physique34. Les questions esthétiques et corporelles rapprochent en effet La Culture physique du mouvement naturiste, d’autant plus que certains médecins naturistes, comme le Dr. Georges Rouhet (1854-1952) – que Marchesseau vénère –, le Dr. Maurice Didier (1883-1947), le Dr. Paul Audollent (1863-1934) et le Dr. James-Edward Ruffier (1875-1965), collaborent également avec Desbonnet. À ce sujet, la thèse de Sylvain Villaret a su détailler « les influences réciproques » à l’œuvre dans l’évolution conjointe du naturisme et de l’éducation physique35. Une certaine distance peut toutefois être observée, comme l’illustre un article de Desbonnet daté de 1927. Ce dernier confie à cette occasion ne pas se refuser systématiquement à se rallier aux partisans de la nudité en plein air, mais il se gausse de croiser certains de ses apôtres au restaurant (et non pas en train de « grimper aux arbres pour tenter d’y trouver leur nourriture36 »). De manière générale, les contributions de Marchesseau s’accordent avec l’orientation générale de la revue, qui insiste moins sur le « retour à la nature » et les « lois naturelles » que sur le développement des qualités physiques et de l’harmonie du corps pour « régénérer la race ». La notion de « dégénérescence de la race » est toutefois loin d’être étrangère aux considérations naturistes, notamment chez Carton, Marcel Kienné de Mongeot (1897-1977) et Jacques Demarquette (1888-1969), qui intitule sa revue Régénération. Ce constat, largement répandu au sein de la société française depuis la défaite de 187037, s’est trouvé accentué par la boucherie de 14-18. Il compte même, avec le diagnostic d’une crise du monde moderne et d’un déclin civilisationnel, parmi les raisons mobilisées pour justifier la réponse politique d’une réforme des modes de vie par un retour à la nature. Or, cette thématique s’accompagne le plus souvent de préconisations eugénistes, qui peuvent aller jusqu’à la stérilisation (bien que « sans mutilations déshonorantes ») des « tarés », c’est-à-dire « des alcooliques chroniques, des hérédo-syphilitiques, des tuberculeux dégénérés, des déséquilibrés, des épileptiques, des hystériques, des aliénés et autres porteurs de maladies graves et nerveuses, qui se transmettent de générations en générations » ; ainsi que le demande Desbonnet dans un article reproduit par Marchesseau en 196438. L’humanisme biologique ne se réduit pas à l’eugénisme (qui lui-même ne se réduit pas à pareille recommandation), mais ce domaine de recherche, regardé avec intérêt au sein des cercles naturistes et culturistes au croisement desquels évolue Marchesseau, joue indéniablement un rôle historique important dans la propension à vouloir régenter la vie sociale autour d’un objectif de santé.

Au cœur des préoccupations agrobiologiques et écologistes

Afin d’assurer aux hommes la santé, Marchesseau semble accorder davantage d’importance au bon équilibre biologique du milieu extérieur – c’est-à-dire aux facteurs environnementaux, même si le terme d’environnement n’est pas employé – qu’au contrôle de la reproduction et à l’hérédité. L’altération possible des gènes héréditaires est néanmoins évoquée pour justifier la lutte contre « les facteurs stressants de la civilisation moderne ». En 1966, à l’occasion de son assemblée générale, la Société Française de Naturopathie précise « les grands points sur lesquels doivent porter ses réalisations ». Les trois premiers points, tout comme les deux derniers, sont alors révélateurs des préoccupations du mouvement :

« 1) Mettre en évidence les excès de la civilisation moderne, axée exclusivement sur le Progrès matériel et contraire aux lois biologiques et au bonheur ;

2) Condamner l’usage des « toxiques » en agriculture, élevage, industrie et commerces alimentaires, qui compromettent les équilibres naturels ;

3) Dénoncer toutes les formes de pollution de l’air, de l’eau, des rivières et des mers par les déchets industriels et la radioactivité artificielle ; […]

9) Insister sur le péril d’une surpopulation humaine, liée à l’épuisement des ressources, au déboisement, à la disparition de la faune, etc.

10) Dresser un plan de réformes générales progressives (sans trop bouleverser les assises de la Société), en prenant pour base politique la Santé Naturelle39. »

Le même texte nous fait savoir que ce programme sert en fait de base à l’union fédérale de plusieurs associations qui prévoient de se faire appeler « les 23 associations pour la protection de la vie », et qu’un « comité de coordination » regroupant 30 autres associations est lui aussi en passe d’être créé afin d’accueillir certaines sociétés « qui désirent s’engager avec nous sur certains points de notre action, mais non sur la totalité ». Cet engagement s’inscrirait dans le but de servir de conseil aux pouvoirs publics « pour la réforme de nos structures sociales et nos modes détestables de Vie, afin d’améliorer la Condition Humaine sur les BASES BIOLOGIQUES valables40 ». Le compte rendu d’une conférence de presse, datée du 23 février 1967, nous informe ensuite de la constitution de ce comité (désormais fort de 70 associations) lors d’« un véritable Parlement de la Santé Naturelle » qui s’est tenu le mois précédent et auquel auraient participé d’autres organisations prenant part au milieu naturiste de cette période41. Parmi ces associations figurent « Les Amis de la nouvelle hygiène » de Gérard Nizet (1924-1996), le Centre Fraternel « Vivre en Harmonie » de Raymond Dextreit (1908-2001), « Vie et Action » d’André Passebecq (1920-2010), ou encore « Vie Naturelle » d’André Roux (1926-1996) ; autant de groupements animés par la promotion de la santé naturelle et qui entendaient donc, à ce titre, jouer un rôle dans la préservation de la nature. Ce comité, dans lequel Marchesseau n’apparaît pas comme un élément moteur, ne semble toutefois pas avoir perduré sous cette forme, même s’il est encore fait référence à un « Comité national, fédéral, d’action pour la Protection de la Vie et la sauvegarde des Equilibres Biologiques » en 1970. Des recherches complémentaires permettraient de répondre aux nombreuses questions qui demeurent sur les liens de ce comité avec l’Union mondiale pour la protection de la vie, fondée par Günther Schwab (1904-2006) en 1960, et sa branche de l’Union française pour la protection de la vie, fondée en 1968, qui poursuivaient des buts similaires.

Schwab, ancien membre du parti nazi autrichien et de la SA, est l’auteur d’un bestseller traduit en 1963 intitulé La Danse avec le Diable. Ce roman met en scène une entrevue avec Belzébuth en personne, qui confie à cette occasion diriger une immense organisation de destruction s’occupant, par l’intermédiaire de disciples zélés placés à des postes politiques stratégiques, d’empoisonner méthodiquement la nature. L’ouvrage fait si forte impression à Marchesseau que ce dernier le sélectionne parmi les quelques livres de la « Bibliothèque bio-humaniste » présentée dans le premier numéro de La Vérité. En 1969, le Congrès international de la naturopathie française se déroule même sous la présidence d’honneur de Günther Schwab. En outre, un autre « roman à thèse » est lui aussi recommandé par Marchesseau à ses lecteurs. Il s’agit du fameux Printemps silencieux de Rachel Carson, également traduit en français en 1963, dans lequel sont détaillés les ravages causés par les insecticides comme le DDT. Si les naturistes alertaient déjà avant-guerre sur les diverses pollutions affectant le milieu naturel, ces deux ouvrages, en raison de leur audience, ont indéniablement joué un rôle séminal dans la constitution d’une « conscience écologique » (qui ne se présente pas encore comme telle) animée par un véritable sentiment d’urgence.

Manchette du premier numéro de La Vérité (juillet 1972). BnF

Manchette du premier numéro de La Vérité (juillet 1972). 

L’humanisme biologique prôné par Marchesseau dans les années qui suivent illustre, à son échelle, cette conscience nouvelle qui trouve un terrain de diffusion privilégié parmi les promoteurs de la santé au naturel. La constitution du parti bio-humaniste, en 1972, pourrait même être considérée comme l’une des premières aventures politiques de l’écologisme français. Apprécier l’importance historique de ce lancement réclame cependant de sortir des textes pour saisir ce parti et l’humanisme biologique « dans les chairs », dans leur insertion au croisement de plusieurs réseaux militants. Or, sur ce point, de nombreux doutes entourent l’importance et la réception de l’humanisme biologique en dehors du milieu naturopathique. Son exemple n’est d’ailleurs pas relevé dans la thèse d’Alexis Vrignon sur La Naissance de l’écologie politique en France. Une partie de ce précieux travail était pourtant consacrée aux critiques naturistes du progrès que Vrignon perçoit comme « l’une des matrices de l’écologisme du second XXe siècle42 ». À l’inverse, une attention particulière est accordée à Nature et Progrès, une association également issue pour une part du milieu naturiste, mais qui s’occupe en premier lieu d’agriculture, et non de thérapeutique.

Si l’humanisme biologique, à cette période, est à comprendre dans le contexte du mouvement écologiste naissant, sa formulation doit sans doute beaucoup au développement parallèle de l’agriculture biologique, qui a déjà fait l’objet de plusieurs travaux universitaires récents43. En 1964, alors que l’Association Française d’Agriculture Biologique compte 400 adhérents44, une scission s’opère parmi les promoteurs d’une agriculture exempte de produits chimiques. André Louis (1901-1970), ingénieur agronome, et Matteo Tavera (1905-1970), architecte et viticulteur, décident de démissionner en opposition au circuit commercial que décide de mettre en place le semencier Raoul Lemaire (1884-1972) pour promouvoir l’agrobiologie. Ils fondent la revue et l’association Nature et Progrès, ou Association Européenne d’Agriculture et d’Hygiène Biologiques. Comme ce nom le laisse présager, il n’était pas seulement question d’agriculture au sens strict à Nature et Progrès. Louis-Claude Vincent (1906-1988) évoque par exemple « La bioélectronique et la vie » lors de l’assemblée générale de 1966. Selon son auteur, il s’agit d’une science qui a pour but « l’étude des microcourants de la vie » et qui permettrait tant de diagnostiquer les maladies que de surveiller les qualités vitales des produits cultivés. Surtout, André Birre (1904-1991) diffuse au sein du mouvement le concept de « biopolitique », quelques années avant que Michel Foucault (1926-1984), dont on ne sait rien de sa connaissance des travaux de Birre, ne popularise le terme pour désigner le contrôle capitaliste des corps45.

Pour cette figure importante de Nature et Progrès, la biopolitique renvoie à « la science et l’art de la conduite des États, compte-tenu des limites imposées par les lois naturelles et les données ontologiques46 ». Sur le plan national, ce concept émerge des travaux de l’Organisation Scientifique pour l’Entretien de la Vie (à partir de 1966 « Organisation du Service de la Vie »), qu’il avait lancé en 1959 et déclaré en 1964, et qui se donnait pour objet la recherche et l’enseignement des moyens de progrès dans le respect des lois naturelles47. Un constat préside aux travaux de cette organisation : « Si l’humanité veut pouvoir continuer son évolution et atteindre un plan plus élevé, selon les propos mêmes d’Alexis Carrel et d’Albert Einstein, elle doit en revenir délibérément au respect des Lois de la Vie et à la coopération avec la nature, au lieu de la vouloir dominer et exploiter comme elle le fait aujourd’hui48. » Comme le remarque Vrignon, « le salut passe alors par une redéfinition des critères qui définissent le bien et le souhaitable dans une société qui doit retourner à la nature49 ». Sur le plan international, ces travaux peuvent être rattachés aux congrès allemands, auxquels Birre participe, de la Internationale Gesellschaft für Nahrungs- und Vitalstoff-Forschung (Association internationale pour la recherche sur l'alimentation et les substances vitales), décrite par Detlef Briesen comme « une alliance étrange entre experts en médecine naturelle, propriétaires de magasins d’aliments naturels, chercheurs en nutrition, chimistes, biologistes et physiciens engagés dans la lutte pour l’environnement et une alimentation saine50 ».

Face aux nombreux écrits pointant les racines réactionnaires de l’écologisme51, Vrignon s’applique avec justesse à démontrer que le mouvement naturo-écologiste français naissant ne saurait être réduit à la culture protéiforme de la droite réactionnaire, quand bien même il y participe indéniablement ; comme l’exemple de Marchesseau, qui déplore par ailleurs « la désintégration de la Famille par les fausses libertés accordées aux enfants, à la femme, etc.52 », tend à le montrer. L’évolution de Nature et Progrès, qui fait suite aux décès accidentels de ses deux cofondateurs en 1970, et son ouverture aux militants « de gauche » intéressés par la question environnementale, est notamment mobilisée par Vrignon pour illustrer le renouvellement politique des courants naturistes. Sur ce point, comme sur les accointances et les opinions « de droite » des acteurs du milieu naturo-écologiste, des études historiques complémentaires demandent cependant d’être menées. Vrignon rappelle également qu’il peut être trompeur de catégoriser un auteur à l’extrême-droite de l’échiquier politique en s’appuyant seulement sur son intérêt pour l’œuvre d’Alexis Carrel (1873-1944). La postérité de ce dernier est désormais considérablement entachée par le rappel de ses positions favorables à l’eugénisme stérilisateur mis en place par le régime nazi vis-à-vis d’individus déclarés malades mentaux53, ainsi que par sa participation notable au régime de Vichy, mais sa réputation, en tant que Prix Nobel auteur du best-seller L’Homme, cet inconnu (1935), n’était pas la même au cours des années 196054. La principale raison du succès de cet ouvrage et des références pullulantes à l’œuvre de Carrel au sein du milieu naturiste n’est toutefois pas évoquée : fervent catholique, Carrel publie un texte spiritualiste critiquant la science trop matérialiste dont il est pourtant l’un des plus remarquables produits.

Sur la vague des spiritualités contemporaines

Il serait en effet réducteur de développer une lecture strictement politiste, à l’aune du clivage gauche/droite, pour analyser l’humanisme biologique. Marchesseau, comme la plupart des acteurs du milieu naturiste, se réclame – le plus souvent implicitement – du « spiritualisme », d’une vision spirituelle du monde, supposément plus élevée, qui manquerait au développement de la science et du monde modernes. Ce constat n’est pas nouveau, il est largement porté durant l’entre-deux-guerres au sein du holisme médical, un large milieu médical réuni par une attitude commune qui tend à considérer le patient comme un tout aux aspects physiques et psychiques interconnectés, inscrit dans un environnement spécifique55. Le naturisme médical des années 1930 s’inscrivait dans ce paysage en plein essor, animé par la présence notable et influente d’acteurs, médecins ou non, appartenant aux courants ésotériques de leur temps. Ces courants, qu’il s’agisse du milieu occultiste, du mouvement théosophique ou encore des cercles spirites, magnétiques et rosicruciens, forment des groupes sociaux au sein desquels des théories et des pratiques concernant la nature de l’homme, du monde et de la vie sont élaborées et partagées dans un climat culturel situé au carrefour de la science, de la religion, de la philosophie et des arts56. À ce titre, les courants ésotériques partagent et promeuvent activement le constat d’une science et d’un monde matérialistes qu’il convient d’orienter différemment, selon leurs vues, comme l’atteste le Congrès spirite et spiritualiste international de Paris, organisé du 9 au 16 septembre 1889, et qui réunissait ces différents courants unis dans leur opposition au « matérialisme néantiste » de leur temps57.

Marchesseau, comme la plupart des individus fréquentant le milieu naturiste d’avant et d’après-guerre, apparaît très au fait de ces courants et de leurs propositions. Le premier numéro d’Académos comporte ainsi une rubrique intitulée « Philosophie, Initiation, etc. », « réservée aux grands problèmes de l’origine, de l’existence, de la destinée humaine ; études sur la vie, l’âme, la mort, la matière, l’esprit, etc., examens des systèmes : morale, religion, métaphysique, ésotérisme, occultisme, etc… ». Le premier article de la rubrique, rédigé par Marchesseau lui-même, s’occupe de présenter les différentes réponses formulées aux grandes questions existentielles, c’est-à-dire « a) Les anticipations scientifiques ; b) Les systèmes philosophiques ; c) Les thèmes religieux ; d) Les théories de l’occultisme ». Or, tandis que « la science est limitée par ses moyens matériels d’investigation », Marchesseau affirme que « l’occultisme aboutit à une unité parfaite et à des précisions troublantes qui méritent d’être connues58 ». Cette rubrique entend alors faire pénétrer le lecteur « sous les voûtes de la connaissance métaphysique à petits pas ». Les premiers numéros font à ce titre la part belle aux théories « ultrascientifiques », qui assument se situer au-delà des théories scientifiquement admises, comme l’anthropogénèse blavatskyenne (de la théosophe Helena Blavatsky (1831-1891), elle-même inspirée et reprise par d’autres auteurs) qui affirme que l’homme était présent sur terre dès les premiers temps géologiques et qu’il existe des « races racines » (lémurienne, atlante, etc.) qui sont autant d’étapes dans l’évolution humaine59. Cependant, l’orientation de la revue change rapidement, en même temps que l’emphase n’est plus mise sur le concept d’académisme et la volonté d’un développement intégral de l’être humain par le biais d’académies de « culture humaine ».

Marchesseau se recentre en effet sur le développement de la naturopathie et la promotion de Vitagermine, une société familiale de vente de produits et d’aliments naturels, avant de reprendre la direction de La Culture physique pour progressivement absorber le mouvement culturiste fondé par Desbonnet. Le concept de perfectionnement intégral, qui induit également un perfectionnement philosophique et spirituel, est néanmoins remobilisé par Marchesseau à la fin de l’année 1963, au moment où il commence à poser les premières pierres de ce qui deviendra l’humanisme biologique. Il défend alors la nécessité d’une « morale biologique », pour qui : « Est bien, tout acte qui contribue au perfectionnement individuel intégral. Est mal, tout acte qui s’oppose à ce perfectionnement ou le freine60. » Avec cette morale ou philosophie « biologique », « la civilisation actuelle, scientifique, ne serait plus sans guide » et l’homme serait remis « dans la voie de sa Destinée ». Pour Marchesseau, « il est certain que notre Salut est dans cet effort philosophique pour comprendre le Sens de la Vie61 […] ». Sa revue, désireuse de faire reconnaître la valeur scientifique de la naturopathie, se garde toutefois de référence à l’occultisme, au spiritualisme ou à la religion, avant une évolution graduelle à partir de la seconde moitié des années soixante. Ce glissement s’est opéré en parallèle de la diffusion du concept d’humanisme biologique, et dans le contexte plus général de ce qui a plus tard été étudié comme « le New Age », cette « mouvance fondée sur la (re)découverte et la réinterprétation de rituels, thérapies et cosmologies d’origines historique et culturelle diverses, réagencés de façon créative dans des logiques d’accomplissement spirituel62 ».

Dans un article daté de 1965, Marchesseau constate avec regret l’engouement des français pour « les techniques orientales pratiques » comme le judo, l’acupuncture et le yoga63. Il défend alors la « gymnastique des organes » de Desbonnet, qui permet d’atteindre les mêmes buts « de maîtrise de soi, de sagesse et de calme intérieur ». Pour lui, « il n’est point besoin d’aller en Orient pour trouver les bases solides d’un véritable humanisme biologique64 ». Percevant l’intérêt renouvelé du public pour le développement spirituel individuel, il renoue prudemment avec des références spiritualistes. En 1967, dans un article évoquant la nécessité de l’humanisme biologique, il évoque ainsi le passage d’un âge d’or de l’humanité, remontant avant les temps dits préhistoriques, quand « Dieu s’identifiait à la nature » et que les hommes vivaient sainement, à l’âge du feu, marqué par la science et la destruction de l’ordre naturel, jugé imparfait65. Autrement dit, le passage « de l’Ordre Naturel (de Dieu) au Désordre Humain (des savants) ». Cette même année, un collaborateur fait référence aux « fondements spirituels » et aux « lois qui sont à la fois naturelles et divines » à l’occasion d’un article traitant de l’humanisme biologique66. Dans le même numéro, un compte rendu de L’Initiation de Pietro, un ouvrage du Dr Francis Lefébure (1916-1988), précise que « ce livre expose les méthodes nouvelles et très puissantes pour obtenir la clairvoyance, le dédoublement et, parallèlement, les qualités morales les plus élevées67 ». Marchesseau considère en outre la technique par les fluides comme l’une des dix grandes techniques thérapeutiques de la naturopathie. Ces fluides, ce sont « tous les corps subtils qui échappent, en général, aux mesures », dont certains sont des « fluides spirituels », distribués par les guérisseurs spirituels qu’il distingue de l’action des « magnétiseurs physiques68 ». En 1971, « le déclin de tout esprit religieux, ou de morale métaphysique par la confusion des dogmes et face à l’athéisme, au matérialisme, etc. » est considéré comme l’une des causes de la chute d’une civilisation humaine dans un article présentant des « notions de sociologie biologique69 ». Les exemples pourraient être multipliés, d’autant plus que la dimension spirituelle est de plus en plus marquée au cours des années 1970, notamment suite au changement de nom de la revue, quand celle-ci (re)devient La Vérité. En 1980, un article sur la réincarnation écrit par Jean Choisel (1921-2001), le traducteur de Schwab, est accompagné d’une note de la rédaction qui ne laisse plus de place au doute : l’humanisme biologique, déjà qualifié de « philosophie spiritualiste » l’année précédente70, a délaissé la cause écologiste pour la cause spirituelle. Cette note mérite d’être citée dans son entièreté :

« Cette étude sur la réincarnation se rattache à nos études sur l’Homme total, but de notre enseignement. Si certains lecteurs estiment que nous devrions nous borner aux seuls sujets traitant de l’hygiène vitale (naturopathie orthodoxe), ils oublient que notre conception de la vie relève de l’Humanisme Biologique et que cette philosophie se rattache au Vitalisme, branche du spiritualisme. Le bio-humanisme est la voie de l’ascension. Il faut passer par un corps minéral dense, un corps vital sain (ou épuré) et un corps mental lucide pour acquérir un corps spirituel et une âme aptes à remplir correctement leurs fonctions d’ouvriers du Cosmos.

L’Humanisme Biologique apporte donc, aux hommes, non seulement la santé, la vitalité et la longévité, avec la maîtrise de soi, la clarté intellectuelle et l’esprit de synthèse qui fondent les sociétés heureuses et pacifiques, mais encore la sagesse, la connaissance intuitive et la foi qui chassent nos angoisses et doivent nous donner une “conscience cosmique”, nous révélant le rôle magnifique que nous jouons dans l’œuvre universelle71. »

Conclusion

Cette volonté du tenant de l’humanisme biologique d’initier les individus, à défaut de pouvoir influer sur les politiques publiques, trouve son accomplissement dans la création de « La Table d’Emeraude », une association « culturelle, initiatique et chevaleresque » qui promet à ses membres de devenir un « sage », un « initié », « connaissant exactement l’Ordre du Monde, et la place que chacun doit occuper dans cette immense machine cosmique qu’est l’Univers72 ». Cette association aurait fonctionné sur la base de grandes cérémonies annuelles, ritualisées, et la distribution régulière par voie postale de fiches informatives portant sur des sujets variés, destinées à constituer « l’Encyclopédie Permanente des Sciences humaines ». Elle vient ainsi confirmer l’appartenance de la naturopathie telle que la concevait Marchesseau au champ des pratiques spirituelles contemporaines. Cette pratique médicale ne se confine pas au domaine matériel, elle porte avec elle, du moins à ses débuts en France, une dimension spirituelle plus ou moins marquée qui la distingue pour une part de la pratique médicale « allopathique » classique. L’humanisme biologique, d’abord investi pour inclure l’action de son auteur dans le champ politique et dans la lutte contre les pollutions environnementales, charrie indéniablement cette dimension avec lui, et ceci de façon particulièrement évidente à la fin des années 1970. Olivier Faure a écrit que « la médecine du XVIIIe siècle ne sépare jamais le médical et le scientifique du social et du politique73 » ; l’humanisme biologique, à l’instar du naturisme et du holisme médical des années trente, poursuit cette tradition en même temps qu’il incorpore le spirituel et le religieux. Son étude donne à voir des courants scientifiques, politiques et religieux en apparence variés, mais qu’il relie, du culte du corps au chemin spirituel, en passant par la conscience écologique. L’enquête historique complète alors les analyses sociologique et anthropologique encore partielles de la naturopathie, qui font également état d’un tel entremêlement74.

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1

Jean-Paul Gaudillière, Inventer la biomédecine, la France, l’Amérique et la production des savoirs du vivant (1945-1965), Paris, La Découverte, 2002.

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2

Pierre Valentin Marchesseau, « Cessons de faire les imbéciles », Santé-beauté et culture physique (réunies), 4e trimestre, 1964, p. 2.

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3

« Société française d’hygiène et de médecine naturelles - Annonce JOAFE parue le 29 juillet 1955 », Journal-officiel.gouv.fr. En ligne : https://www.journal-officiel.gouv.fr/pages/associations-detail-annonce/?q.id=id:195501780016

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4

Pierre Valentin Marchesseau, « Une humanité délirante s’apprête à ravager le monde », Hygiène et médecine naturelles, Santé-beauté et culture physique (réunies), vol. 839, 1967.

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5

Pierre Valentin Marchesseau, « Nos buts », Hygiène et médecine naturelles, Santé-beauté et culture physique (réunies), vol. 838, 1967.

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6

Pierre Valentin Marchesseau, « Ils marchent sur la tête », Hygiène et médecine naturelles, Santé-beauté et culture physique (réunies), vol. 842, 1968.

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7

Pierre Valentin Marchesseau, « Ils marchent sur la tête », Hygiène et médecine naturelles, Santé-beauté et culture physique (réunies), vol. 842, 1968.

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8

« Fédération française de naturopathie, d’humanisme et de sociologisme biologiques - Annonce JOAFE parue le 14 mai 1969 », Journal-officiel.gouv.fr. En ligne : https://www.journal-officiel.gouv.fr/pages/associations-detail-annonce/?q.id=id:196901120008

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9

Santé-beauté et culture physique (réunies), vol. 842, 1968.

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10

Pierre Valentin Marchesseau, « Editorial », Hygiène et médecine naturelles, Santé-beauté et culture physique (réunies), vol. 845, 1970.

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11

Pierre Valentin Marchesseau, « L’homme face à son destin », Hygiène et médecine naturelles, Santé-beauté et culture physique (réunies), vol. 845, 1970.

Retour vers la note de texte 17782

12

Pierre Valentin Marchesseau, « Après nous le déluge », Hygiène et médecine naturelles, Santé-beauté et culture physique (réunies), vol. 846, 1970.

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13

La Vérité, vol. 1, juillet 1972.

Retour vers la note de texte 17784

14

La Vérité, vol. 1, juillet 1972.

Retour vers la note de texte 17785

15

Le Journal officiel fait bien état de la création, en juillet 1972, d’un « mouvement social d’action politique pour la sauvegarde de l’homme et de rénovation sociale en fonction des impératifs biologiques » intitulé Bio-Humanisme. Cf. https://www.journal-officiel.gouv.fr/pages/associations-detail-annonce/?q.id=id:197201790038

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16

« Troisième circonscription de Meurthe-et-Moselle », Wikipédia, 19 janvier 2024 (consulté le 29 janvier 2024).

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17

Affiche consultable dans les Archives électorales du CEVIPOF (Sciences Po).

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18

Pierre Valentin Marchesseau, « L’internationale des vivants », Hygiène et médecine naturelles, Santé-beauté et culture physique (réunies), vol. 853, 1972.

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19

« Les Cahiers de l’humanisme biologique et de la naturopathie orthodoxe (hygiène vitale) ».

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20

Pierre Valentin Marchesseau, « L’humanité a besoin d’un “garde-fou” », La Vérité, vol. 866, 1977.

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21

La Vérité, vol. 866, octobre-décembre 1977.

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22

Les centres sont toutefois renommés en « Centres d’Hygiène vitale agréés par la FFN et l’Institut d’Humanisme Biologique » au cours de l’année 1980.

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23

Alain Rousseaux, « Qu’est-ce que l’humanisme biologique et la naturopathie orthodoxe (hygiène vitale) ? », La Vérité, vol. 869, 1978.

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24

Alain Rousseaux, « Qu’est-ce que l’humanisme biologique et la naturopathie orthodoxe (hygiène vitale) ? », La Vérité, vol. 869, 1978.

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25

La Vérité, vol. 869, octobre-décembre 1978.

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26

Les publications de Marchesseau datées des années 1980 et 1990 n’ont pas encore été dépouillées de manière exhaustive, mais des coups de sonde révèlent que le concept protéiforme d’humanisme biologique continue d’être employé. La revue Arts-Santé publiée durant un temps à la suite de La Vérité est par exemple sous-titrée « Revue de l’Humanisme Biologique ». Il reste néanmoins vrai qu’à la fin des années 1980 les occurrences du terme sont bien plus rares qu’une décennie auparavant, pour des raisons certainement contextuelles.

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27

La Vérité, vol. 13, octobre-décembre 1980.

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28

Arnaud Baubérot, Histoire du naturisme, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2004, p. 9.

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29

Paul Carton, Traité de médecine d’alimentation et d’hygiène naturistes, Paris, Maloine, 1920, p. 6-7.

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30

Paul Carton, Traité de médecine d’alimentation et d’hygiène naturistes, Paris, Maloine, 1920, p. 6-7.

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31

Hygiène et médecine naturelles, vol. 854, 1973.

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32

À ce sujet, lire notamment Stephen L. Harp, Au Naturel. Naturism, Nudism and Tourism in Twentieth-Century France, Baton Rouge, Louisiana State University Press, 2014.

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33

Pierre Valentin Marchesseau, « La tâche du naturisme », Naturisme, vol. 394, 1er avril 1937.

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34

Philippe Campillo et Alessandro Porrovecchio, « La conception de la beauté corporelle dans “La Culture Physique” : la recherche de l’idéal antique », STAPS, vol. 119, n° 1, 2018, p. 11-25.

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35

Sylvain Villaret, L’Évolution du naturisme et de l’éducation physique : les influences réciproques (XIXe siècle-milieu du XXe siècle), thèse de doctorat en sciences et techniques des activités physiques et sportives, Université Claude Bernard Lyon 1, 2001.

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36

Edmond Desbonnet, « Il faut mettre ses actes en concordance avec ses paroles si l’on n’est pas un fumiste », La Culture physique, vol. 443, mars 1927.

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37

Jean-Christophe Coffin, « Le thème de la dégénérescence de la race autour de 1860 », History of European Ideas, vol. 15, n° 4-6, août 1992, p. 727-732.

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38

Edmond Desbonnet, « Qui veut la fin, veut les moyens », Santé-beauté et culture physique (réunies), vol. 825, 1964.

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39

Hygiène et médecine naturelles, Santé-beauté et culture physique (réunies), vol. 836, 1967, p. 12.

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40

Hygiène et médecine naturelles, Santé-beauté et culture physique (réunies), vol. 836, 1967, p. 12.

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41

Hygiène et médecine naturelles, Santé-beauté et culture physique (réunies), vol. 837, 1967, p. 11.

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42

Vringon mentionne la candidature d’Alfred Goron, « Candidat de la Paix, de Bio-Humanisme », aux législatives de 1973, mais ce dernier, qui se fait certes surnommer « l’ami de la montagne, le castor constructeur », ne fait aucune référence aux pollutions environnementales dans son affiche électorale (son nom n’apparaît d’ailleurs pas parmi les collaborateurs et disciples de Marchesseau). Cf. Alexis Vrignon, La Naissance de l’écologie politique en France. Une nébuleuse au cœur des années 68, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2017 ; Archives électorales du CEVIPOF (Sciences Po).

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43

Venus Bivar, Organic resistance: the struggle over industrial farming in postwar France, Chapel Hill, The University of North Carolina Press, 2018 ; Céline Pessis, Défendre la terre. Scientifiques critiques et mobilisations environnementales des années 1940 aux années 1970, thèse de doctorat en histoire des sciences et techniques, EHESS, 2019 ; Florian Rouzioux, Face-à-face agrobiologique. Regards croisés sur les courants Lemaire-Boucher et Nature & Progrès (1964-1974), mémoire de master en histoire, Université d’Angers, 2020.

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44

Florian Rouzioux, Face-à-face agrobiologique. Regards croisés sur les courants Lemaire-Boucher et Nature & Progrès (1964-1974), mémoire de master en histoire, Université d’Angers, 2020, p. 5.

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46

André Birre, « Pourquoi la Biopolitique dans “Nature & Progrès” », Nature & Progrès, juillet-septembre 1969, p. 30. Cité in Florian Rouzioux, Face-à-face agrobiologique. Regards croisés sur les courants Lemaire-Boucher et Nature & Progrès (1964-1974), mémoire de master en histoire, Université d’Angers, 2020, p. 52.

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47

« Organisation scientifique pour l’entretien de la vie (O.S.V.) - Annonce JOAFE parue le 17 mai 1964 », Journal-officiel.gouv.fr. En ligne : https://www.journal-officiel.gouv.fr/pages/associations-detail-annonce/?q.id=id:196401150055

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48

Cahiers de la Biopolitique, vol. 1, 2e trimestre 1968, p. 4.

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49

Alexis Vrignon, La Naissance de l’écologie politique en France. Une nébuleuse au cœur des années 68, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2017.

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50

Detlef Briesen, Das gesunde Leben: Ernährung und Gesundheit seit dem 18. Jahrhundert, Frankfurt am Main, Campus Verlag, 2010 ; voir aussi « Internationale Gesellschaft für Nahrungs- und Vitalstoff-Forschung », Wikipédia, 30 avril 2023 (consulté le 29 janvier 2024).

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51

Luc Ferry, Le Nouvel ordre écologique, Paris, Gallimard, 2002 ; Stéphane François, L’Écologie politique : une vision du monde réactionnaire ?, Paris, Cerf, 2012. La démarche historienne de François est toutefois à distinguer du geste polémique de Ferry.

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52

Hygiène et médecine naturelles, Santé-beauté et culture physique (réunies), vol. 848, 1971.

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53

Cet accord est formulé dans la version allemande de L’Homme, cet inconnu. Rappelons également que la version originale, qui prône « l’eugénisme volontaire » comme l’expression d’une loi naturelle et la constitution d’une « aristocratie biologique héréditaire », suggère notamment l’exécution dans « un établissement euthanasique, pourvu de gaz appropriés », des criminels coupables de meurtre, de vol à main d’armée, d’enlèvement de mineurs, mais aussi de ceux « qui ont dépouillé les pauvres, qui ont gravement trompé la confiance du public ». Sur Carrel, lire Andrés Horacio Reggiani, God’s Eugenicist. Alexis Carrel and the Sociobiology of Decline, New York-Oxford, Berghann Books, 2007.

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54

En 1969, l’une des facultés de médecine de Lyon est même baptisée « Faculté de médecine Alexis-Carrel », nom qui lui sera retiré en 1996.

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55

Cf. Léo Bernard, Hippocrate initié. Courants ésotériques et holisme médical en France durant l’entre-deux-guerres, thèse de doctorat en histoire, EPHE-PSL, 2021.

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56

Cette description est la nôtre, d’autres approches et définitions cohabitent au sein des études universitaires sur l’ésotérisme. Pour une vision plus représentative (mais toujours partielle) de ces courants, voir Wouter J. Hanegraaff et al. (dir.), Dictionary of Gnosis & Western Esotericism, Leyde-Boston, Brill, 2006.

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57

Papus, « Les diverses écoles officiellement représentées au congrès », in Compte rendu du Congrès spirite et spiritualiste international tenu à Paris du 9 au 16 septembre 1889, Paris, Librairie Spirite, 1890, p. 56.

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58

Pierre Valentin Marchesseau, « Homme ! d’où viens-tu ? qui es-tu ? où vas-tu ? L’Angoisse Humaine (La préoccupation métaphysique ou la recherche de l’Absolu) », Académos, vol. 1, 1950.

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59

À ce sujet, lire Julian Strube, « Theosophy, Race, and the Study of Esotericism », Journal of the American Academy of Religion, vol. 89, n° 4, 2021, p. 1180-1189.

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60

Pierre Valentin Marchesseau, « Face au matérialisme scientifique, il faut revaloriser l’humain, en revenant à la Nature », Santé-beauté et culture physique (réunies), 4e trimestre 1963.

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61

Pierre Valentin Marchesseau, « Face au matérialisme scientifique, il faut revaloriser l’humain, en revenant à la Nature », Santé-beauté et culture physique (réunies), 4e trimestre 1963.

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62

Emma Gobin, « L’émergence du New Age dans la Cuba postsoviétique. Changement social, médecines alternatives et circulations religieuses », Autrepart, vol. 74-75, 2015, p. 137-156.

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63

Pierre Valentin Marchesseau, « Mieux que le yoga, la gymnastique des organes », Santé-beauté et culture physique réunies, 2e trimestre 1965.

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64

Pierre Valentin Marchesseau, « Mieux que le yoga, la gymnastique des organes », Santé-beauté et culture physique réunies, 2e trimestre 1965.

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65

Pierre Valentin Marchesseau, « Une humanité délirante s’apprête à ravager le monde », Hygiène et médecine naturelles, Santé-beauté et Culture Physique (réunies), vol. 839, 1967.

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67

Thérèse Feugère, « Nous avons lu pour vous », Hygiène et médecine naturelles, Santé-beauté et culture physique (réunies), vol. 840, 1967.

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68

Pierre Valentin Marchesseau « Notions de magnétothérapie », Hygiène et médecine naturelles, Santé-beauté et culture physique (réunies), vol. 847, 1970.

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69

« Notions de Sociologie biologique », Hygiène et médecine naturelles, Santé-beauté et culture physique (réunies), vol. 848, 1971.

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70

« Ce que nous sommes, ce que nous faisons et ce que nous voulons », La Vérité, vol. 872, juillet-septembre 1979.

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71

La Vérité, vol. 874, janvier-mars 1980.

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72

La Vérité, vol. 882, janvier-mars 1982, p. 7.

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73

Olivier Faure, Histoire sociale de la médecine (XVIIIe - XXe siècles), Paris, Anthropos, 1994, p. 52.

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74

Voir à ce sujet la thèse d’Anahita Grisoni, Sous les pavés, la terre : culte du bien-être et nouveaux métiers. La naturopathie en transformation à la conquête du marché, thèse de doctorat en sociologie, EHESS, 2011.