Roger Chartier est l’un des tout premiers et des rares membres de la nouvelle École des hautes études en sciences sociales à ne pas venir de l’ancienne VIe section de l’École pratique des hautes études. Spécialiste de l’étude des textes, il porte sur les documents d’archives que nous présentons le regard d’un historien, et celui d’un contemporain du développement de cette nouvelle École.
Roger Chartier : Trois documents, trois dates, trois genres textuels.
1958
Le premier document, « 30 juin 1958, Sciences économiques et sociales », est un texte écrit par Fernand Braudel. On peut rappeler que celui-ci était président de la VIe section de l’École pratique des hautes études depuis 1956, et professeur au Collège de France depuis 1950. Il dirigeait les Annales, Histoire, Sciences sociales depuis 1957. Ce texte est en fait dans son contenu essentiel un rapport que Braudel avait écrit en 1956 afin, comme il le dit, d’intégrer la section dans certaines dispositions qui devaient figurer dans le plan quinquennal 1957-1961. Il reprend le projet en 1958, en indiquant que deux ans se sont écoulés sans que, visiblement, rien ne se soit passé durant ce laps de temps. Braudel reprend donc le texte de 1956, avec un ajout final seulement. C’est donc un texte assez curieux, mais l’essentiel y est la relation entre deux institutions. La première, celle dont il est le président, la VIe section de l’École pratique des hautes études, fondée en 1947 avec le titre de « Sciences économiques et sociales », et l’autre, l’université de Paris, qui depuis 1896 est organisée à partir de ses facultés : faculté des sciences, faculté des lettres, faculté de droit et faculté de médecine. Le projet développé par Braudel, c’est le projet d’une nouvelle faculté, qui serait la faculté des sciences économiques et sociales, ou dans d’autres formulations, des sciences économiques, sociales et politiques. Avec une tension fondamentale. D’un côté, il s’agit de placer cette faculté dans le cadre de l’université de Paris, mis en place en 1896 – Braudel signale qu’il n’est pas bon de porter atteinte à ce qui existe et que ce n’est pas là son projet. Mais, d’un autre côté, le projet engage totalement la VIe section de l’École pratique des hautes études, qui doit apporter dans cette nouvelle faculté toutes ses structures et toutes ses formes de fonctionnement, d’abord avec le primat donné, après l’année propédeutique, au séminaire, « à l’image de la VIe section », dit le texte, ensuite avec le rôle essentiel des centres de recherche présents dans l’institution en construction, à savoir la Maison des sciences de l’homme dont la fondation n’interviendra, en fait, qu’en 1963. De plus, une partie du corps professoral de cette nouvelle faculté doit être constituée par les directeurs d’études, en particulier ceux d’entre eux qui sont docteurs, soit 43 sur 67. Cette nouvelle faculté devra être située hors de Paris, donc à distance des autres facultés qui restent dans le centre de la capitale, et elle pourra être augmentée si on lui additionne l’Institut d’études politiques une fois réformé. C’est donc un projet très étrange, puisqu’il s’agit, d’une part, d’ajouter à la carte universitaire une nouvelle faculté et que, d’autre part, cette nouvelle faculté doit être tout entière « coiffée », c’est le mot de Braudel, par les pratiques, les institutions, l’organisation de la VIe section de l’École pratique. La lecture du projet m’a un peu rappelé le concept de supplément chez Jacques Derrida1. D’un côté, un supplément c’est quelque chose qu’on ajoute, et ici on ajouterait une faculté, mais en même temps le supplément c’est une substitution. Or au fonctionnement universitaire classique est bien substitué le modèle intellectuel ou organisationnel qui est celui de la VIe section de l’École pratique des hautes études. C’est sans doute cette ambiguïté, ou cette difficulté, qui fait que le projet ne s’est pas transformé en une réalité institutionnelle.
Dans ce premier texte, il y a un autre aspect intéressant. Ce nouveau programme universitaire, soumis donc à la logique de la VIe section de l’École pratique des hautes études, est un programme dont le modèle est fondé sur le « double humanisme » des sciences sociales. Le premier est celui de l’enseignement des langues étrangères, ce qui peut faire écho à l’ouverture de la VIe section aux chercheurs étrangers, et certaines thématiques participent largement d’une histoire européenne, avec forte une présence italienne dès les commencements. Mais plus intéressant me semble être le deuxième pilier de cet humanisme des sciences sociales, c’est-à-dire les « mathématiques sociales ». On ne peut pas ne pas penser ici au texte, lui aussi de 1958, de Braudel sur la longue durée2, qui proposait de donner un langage commun, voire un programme commun aux sciences sociales, mais aussi aux sciences sociales et à l’histoire, si l’histoire n’est pas l’une de ces sciences. Dans cet article de 1960, les trois fondements sur lesquels doit être établie cette communauté des sciences sociales que l’on va dire aussi historiques, étaient, d’abord, la longue durée et plus généralement l’articulation des temps braudéliens, événement, conjoncture et longue durée ; puis, deuxièmement, ce qu’il appelle « la réduction à l’espace », c’est-à-dire des études considérant de larges entités géographiques, en commençant par la Méditerranée ; et, enfin, les mathématiques sociales. Il y a de très longs développements, à la fin de l’article de 1960, sur ces mathématiques sociales, déjà présentes dans le texte du 30 juin 1958 en tant qu’outil essentiel d’une époque où l’étude sérielle, quantitative, statistique, des démographies, des économies, des sociétés est un domaine fondamental. Les mathématiques sociales sont un outil qui doit être enseigné dans la nouvelle faculté des sciences économiques et sociales. Mais les mathématiques sociales, dans le texte de 1960, ne se limitent pas à être cet outil fondamental des études sérielles, quantitatives et statistiques. Elles sont un élément essentiel de la relation entre les modèles théoriques qu’elles permettent de construire et les données empiriques qui peuvent soit correspondre au modèle mathématisé, soit s’en écarter ou le contester. Le projet n’aboutit pas. Il n’y eut pas de faculté des sciences économiques et sociales avant la fragmentation de l’université de Paris en 1970 et les sept universités qui en sont issues.
De plus, le document de 1958 me paraît renvoyer à une réalité plus profonde qui est le rapport ambivalent ou ambigu entre la VIe section de l’École pratique et l’université ou les universités. D’un côté, il y a un ton critique dans toute la première partie du texte, qui vise l’immobilisme, l’apathie ou l’inertie universitaires. C’est cette dépréciation et dans une certaine mesure, cette hostilité à l’égard de l’université qui porte le projet d’une conquête institutionnelle et intellectuelle. Le supplément doit être substitution. Mais il y a aussi, dans le texte, l’idée que les collaborations doivent être possibles, d’où une certaine prudence qui veut ménager, par exemple, l’idée d’une alliance avec l’Institut d’études politiques, autrement dit Sciences Po, mais aussi avec d’autres chercheurs ou professeurs en sciences économiques qui entreraient dans le projet. C’est donc finalement un texte qui se place dans un équilibre instable entre des relations de compétition et de collaboration entre la VIe section et l’université.
1975
Le deuxième document date de 1975. Jacques Le Goff est président de la VIe section depuis 1972. En 1975, grâce aux relations nouées avec celui qui était le secrétaire d’État aux Universités dans le gouvernement Chirac depuis 1974, Jean-Pierre Soisson, le maire d’Auxerre, s’est affirmée l’idée que la VIe section devait se détacher de l’École pratique des hautes études et devenir une nouvelle institution autonome et spécifique : l’École des hautes études en sciences sociales. Le décret qui la fonde est signé le 23 janvier 1975, et les cours dans cette nouvelle institution commencent le 3 novembre de la même année. Le texte que nous avons date de mai 1975. L’École des hautes études en sciences sociales existe donc déjà, mais elle n’a pas encore de réalité pédagogique puisque les séminaires ne commenceront que quelques mois plus tard. Ce texte est singulier parce qu’il me semble adressé aux tutelles. Ce n’est pas un programme pour l’intérieur de la nouvelle École, mais pour le secrétariat d’État aux Universités, pour une commission d’experts et, peut-être, pour d’autres institutions universitaires. Il justifie et présente la nouvelle institution. Or, dans cette présentation, les projets de recherche mentionnés sont tous liés au présent : deux portent sur le tiers-monde, d’autres sur des enquêtes d’histoire orale, sur le « développement » économique, sur l’organisation des espaces urbains ou ruraux… Donc, l’accent est mis exclusivement sur des recherches qui concernent le présent et qui, évidemment, peuvent ainsi donner satisfaction ou justification à ceux qui ont porté la fondation de la nouvelle institution, avec, de plus, accompagnant cet accent, la possibilité de conventions et de contrats que l’établissement pourrait passer avec d’autres institutions universitaires, mais aussi avec les pouvoirs publics.
Dans cette perspective, l’accent est mis sur la spécificité de l’École, mais avec une certaine prudence. L’accent mis sur la spécificité reprend certains des thèmes braudéliens du texte de 1958, c’est-à-dire, pour les résumer, l’idée que dans l’École des hautes études en sciences sociales, la forme dominante de transmission ou de construction du savoir est le séminaire, ce qui, dit le texte, est une rupture avec les modes de transmission du savoir de l’université depuis l’époque napoléonienne, autrement dit le cours magistral. D’autre part, l’idée est que dans la nouvelle École, la recherche ne s’inscrit pas dans les disciplines constituées ou dans des domaines bien établis, mais s’organise à partir de problèmes, de questions, de thèmes, d’objets très concrets, et on trouve même employé le mot de « matérialité ». Ce n’est pas une addition de disciplines qui constitue l’originalité, le cœur ou le sens de l’établissement, mais la construction, à partir du présent, de nouveaux objets ou de nouvelles thématiques, et les réponses à de nouveaux problèmes. Il y a donc une double rupture, avec les formes de transmission et d’élaboration du savoir et avec la géographie constituée des disciplines. Donc une distance par rapport à l’université napoléonienne, comme le dit le texte, avec toutefois un lapsus que je signale ici, puisqu’à la fin du texte, il est mentionné la création de « chaires » nouvelles ; alors que les chaires sont à l’université, ou au Collège de France, la nouvelle École est organisée, comme la VIe section, en « directions » d’études. L’idée du supplément derridien à la Braudel est traduite par ce lapsus. Dernière originalité enfin : les diplômes, puisqu’il est évoqué que l’école donnera son diplôme propre et des thèses de troisième cycle.
Mais ce qui m’a frappé dans ce texte, où l’on peut peut-être reconnaître le style de Jacques Le Goff, c’est un double langage. Il y a, d’une part, le langage de l’affirmation de la différence. Et l’on pourrait ajouter aux « séminaires » et aux « centres », la politique de « publication » et aussi le recrutement, puisqu’il est fait allusion au fait que ceux et celles qui pourront être recrutés par l’École n’auront pas nécessairement suivi un cursus universitaire classique, ou l’objet même des recherches, définies à partir de l’« homme social ». Il y a donc une affirmation ferme, solide, raisonnée de la différence, mais, en même temps, une prudence certaine. Cette prudence consiste à refuser des distinctions artificielles entre l’École et les autres institutions universitaires ou à nuancer l’originalité de la nouvelle institution. C’est la manière de faire de Jacques Le Goff, tout à la fois ferme sur les principes intellectuels et, en même temps, très conciliant et très aimable, afin de ne pas provoquer inutilement ceux qui pourraient se dresser contre la nouvelle institution.
Le point le plus important, à mon avis, est l’oscillation permanente, dans ce texte, entre sciences sociales et sciences humaines. Dès la page 2 du texte, la définition des sciences économiques et sociales est ensuite étendue à l’ensemble des sciences dites humaines. À la ligne 10 de la page 10, il est question, dans le même énoncé, de sciences humaines, puis de sciences sociales. Et il n’y a à aucun moment une définition de la différence entre les unes et les autres. Cette ambigüité est maintenue, bien sûr, dans le nom de l’établissement, qui affiche une continuité avec la VIe section, puisqu’il s’agit d’une École des hautes études en « sciences économiques et sociales ». Mais, de fait, le programme de ce nouvel établissement est plus large que celui des sciences sociales. Et ce qui est tout à fait frappant, c’est qu’il est à un autre moment question de tout l’éventail des « sciences humaines ». Il y a donc une instabilité permanente entre ces diverses formulations Et celle-ci a une raison fondamentale : elle permet de rendre présent l’absent. Pas une seule fois le mot « histoire » n’est prononcé dans ce projet. C’est là évidemment, un legs de la VIe section de l’École pratique, dénommée dès sa fondation par Lucien Febvre section des « sciences économiques et sociales », puisque depuis 1868 la VIe section de l’École pratique était celle des « sciences historiques et philologiques ». L’histoire est donc tout, à la fois, un domaine essentiel et une discipline jamais nommée, ce qui expliquerait aussi pourquoi dans l’énoncé des programmes, tous sont liés au temps contemporain et aucun n’est inscrit dans une dimension historique. C’est donc un texte proprement extraordinaire. Rédigé ou, à tout le moins, assumé par un historien, Jacques Le Goff, dans une école dominée par la tradition de l’histoire des Annales, ce programme ne mentionne aucune approche, enquête ou étude historique. L’absent n’est qu’indirectement présent lorsque sont mentionnées les « sciences humaines » qui viennent s’ajouter aux sciences sociales et s’allier avec elles.
À mon sens, il y a une dimension stratégique dans ce texte de 1975. Et c’est pourquoi il serait bien de poursuivre la recherche sur ses destinataires qui ne sont pas des destinataires de l’intérieur, mais de l’extérieur de l’École, auxquels on expose l’indispensable étude du présent, présentée comme la vocation fondamentale de la nouvelle École, en l’accompagnant de la description d’un certain nombre de fonctionnements nouveaux, originaux, différents de ceux de l’université, mais qui sont décrits sans arrogance ni agressivité. C’est, à mon sens, cette stratégie qui explique la surprenante absence de l’histoire dans le programme scientifique d’une École dont le président et un grand nombre d’enseignants étaient des historiens.
L’affiche de 1975
Voilà qui peut nous amener au troisième document, la première « affiche » des enseignements proposés par l’École à partir de novembre 1975. Cette affiche est très intéressante parce qu’elle est presque l’opposé du programme scientifique énoncé quelques mois auparavant. Les séminaires y sont distribués entre douze rubriques. Dix sont des disciplines traditionnelles (histoire, géographie, psychologie, sociologie, économie, anthropologie), et seulement deux sont vouées à des approches méthodologiques qui pourraient incarner l’aspect pluridisciplinaire affirmé dans le texte de mars 1975 : d’abord, les « mathématiques sociales », première rubrique de l’affiche, comme en écho au Braudel de 1958, suivies des « recherches interdisciplinaires » qui n’ont pas de contenu thématique, mais sont caractérisées par les pratiques de la recherche. Ce sont les deux premières rubriques mais, dans un sens, les deux seules qui expriment l’originalité de l’institution. On a donc ensuite dix découpages disciplinaires, et du même coup, on retrouve l’ambiguïté entre les sciences sociales annoncées par l’affiche et les sciences humaines qui incluent l’histoire. L’histoire est absolument centrale. Elle est la seule discipline à s’étendre sur trois colonnes et elle propose 38 séminaires auxquels on peut ajouter les cinq séminaires de géographie, ce qui fait 43 séminaires pour l’histoire et la géographie alors qu’il n’y en que 16 dans la rubrique « sociologie » et 13 dans la rubrique « anthropologie ». L’affiche ne reflète donc pas du tout le programme scientifique énoncé quelques mois plus tôt mais elle est fidèle au programme des Annales : économie, société, civilisation, puisqu’il y a 16 séminaires d’économie, c’est-à-dire autant que de sociologie et plus que d’anthropologie ; la civilisation se retrouvant évidemment dans l’histoire, mais aussi dans la psychologie, la sémiotique et la linguistique. C’est ce socle disciplinaire qui est massivement présent dans l’affiche et dans la pratique effective de la nouvelle École. C’est le socle hérité des Annales qui peut incorporer la sociologie, comme si se trouvaient finalement réglés les conflits de la fin du XIXe ou du début du XXe siècle entre d’un côté l’histoire et la géographie, ou l’histoire modelée par la géographie, et de l’autre côté la sociologie durkheimienne. Nous lisons donc dans ce programme fondé sur les Annales ce que seront les alliances nouvelles ou des présences nouvelles dans le développement de l’École des hautes études, c’est-à-dire l’anthropologie et les sciences du langage ou des œuvres, qui restent cependant très minoritaire dans cette première affiche, avec seulement 13 séminaires pour l’anthropologie sociale, l’ethnographie et l’ethnologie, et seulement sept dans la rubrique « sémantique, sémiologie et linguistique ».
Ces trois documents sont donc très intéressants, mais il ne faut pas, à mon avis, les commenter dans une perspective qui serait une sorte de geste héroïque de l’histoire de l’École. Il s’agit plutôt de montrer les contradictions, les conflits, les impossibilités, les stratégies de conviction, et de démonter ce qui, derrière les immédiates apparences, est une réalité beaucoup plus complexe, beaucoup plus contradictoire, tant sur la place de l’École sur la carte universitaire que sur les poids des héritages de l’École pratique elle-même. Derrière la tonalité différente de ces textes, on peut aussi retrouver quelque chose des investissements psychologiques ou émotionnels. Le style de Braudel est tout à fait tranchant, dominateur ; celui de Le Goff conciliant, amène, animé par la volonté d’éviter des tensions ou des déchirements inexorables. Le style de l’affiche, quant à lui est le style de la réalité intellectuelle et disciplinaire, auquel peut cependant répondre ou correspondre « l’homme social » qui devient le sujet principal des enquêtes et des séminaires. Il renvoie au social et, en même temps, à une définition des humanités, voire d’un humanisme fondamental dans le projet de l’École.
Patrick Fridenson : Merci beaucoup, cher Roger, pour cette triple analyse. Je vais prendre le relais, en gardant en réserve pour la fin de notre entretien une question qui portera sur ce que ces textes m’inspirent aujourd’hui. Mais ma première question porterait sur le texte de 1958, et sur une référence très nette aux États-Unis, sur ce qu’on fait aux États-Unis, et jusqu’en Russie. Toi qui es un pont vivant entre la France et les États-Unis – nous nous entretenons aujourd’hui entre Paris et Philadelphie –, que penses-tu de cette relation aux États-Unis que Braudel propose aux hommes et aux femmes de ce qui est encore la Quatrième République ?
Roger Chartier : La référence à la Russie reste un peu plus opaque et un peu plus obscure, touchant ce que Braudel, en 1958, en percevait ou savait, ou bien quelle information lui en venait, bien qu’il y ait eu déjà sans doute des liens avec l’Union soviétique, qui se sont développés ensuite dans le cadre de la Maison des sciences de l’homme. La référence aux États-Unis, elle, est évidemment tout-à-fait intéressante parce qu’elle est portée par la figure de Clemens Heller3 qui connaît le monde universitaire américain. Mais quel était le degré de familiarité de Braudel avec le monde universitaire américain en 1958 ? Doit-on entendre chez lui chez une affirmation politique, dans le cadre d’une compétition entre l’Union soviétique et les États-Unis, et donc une référence plus géostratégique que réellement épistémologique ou institutionnelle ? Mais Braudel avait pu aussi avoir connaissance de nouvelles formes de recherche. L’accent mis sur l’usage des mathématiques pour le traitement des données des sciences sociales témoignerait dans ce sens.
Patrick Fridenson : Ce qui est vrai, c’est que dans le développement des travaux sur les aires culturelles qu’on retrouve dans le texte de Le Goff quelques années plus tard, il y avait des manières de penser l’organisation de l’interdisciplinarité d’une manière originale. Je ne suis pas sûr qu’il y ait un contenu réel derrière la mention de l’URSS. En revanche, pour les États-Unis, oui, puisque des programmes se sont développés dès la collaboration nouée entre Braudel et Heller. Ce qui me porterait à une deuxième question, sur le texte de mai 1975 que je ne connaissais pas, alors que le premier – celui de 1958 – était déjà connu sous d’autres formes au moins, antérieures à 1958, et tu as rappelé que celui de 1958 était la relance d’une initiative antérieure. Le deuxième texte est composé, nous l’avons vu en le lisant, de deux parties. Une première partie qui définit en gros l’apport de fond de la nouvelle École des hautes études en sciences sociales. Et une deuxième partie, résultat d’un accord réalisé l’année précédente entre un groupe d’experts désignés par le secrétaire d’État aux Universités, le secrétariat d’État lui-même et une délégation de la VIe section, ces trois instances figurant en page 8 du texte de 1975. La prudence de cette seconde partie, que tu as bien relevée, peut s’expliquer par l’hostilité absolue des professeurs de la Sorbonne, incarnés par le Syndicat autonome, qui ont tenté jusqu’au dernier jour de bloquer le décret qui devait paraître au Journal officiel. Cette prudence est donc extrêmement recommandable parce qu’après tout, le nouveau président de la République, Valéry Giscard d’Estaing, pouvait prétendre à une usurpation de sa propre volonté par son secrétaire d’État aux Universités Jean-Pierre Soisson et par Hubert Damisch, médiateur des échanges entre Jacques Le Goff et Soisson. Et ce texte n’est pourtant pas si prudent que cela. Je donne un exemple, celui de l’économie, qui devrait s’orienter du côté d’une recherche sur la « justice », absente dans la VIe section. On voit là une pression directe de certains des directeurs d’études les plus influents à ce moment-là, Serge Christophe Kolm en particulier. Mais la première partie ne me paraît pas de la même plume. Pourquoi ? Il y a ce mot de « matérialité » que tu as relevé, et qui fait tellement partie de notre vocabulaire le plus actuel. Il y a aussi une phrase qui évoque des « moyens de communication de masse ». Je me suis demandé si la rédaction de ce texte de la première partie, qui comme tu l’as relevé, ne mentionne pas l’histoire, ne pouvait pas être attribué à un certain Roland Barthes4.
Roger Chartier : La distinction des deux parties est évidemment très importante, et tu as raison de le souligner, puisque la deuxième partie est en effet le fruit d’une négociation avec le secrétaire d’État, les experts et la « commission scientifique provisoire » de l’École. C’est surtout dans la première partie que j’ai cru pouvoir reconnaître le style nuancé de Le Goff. La marque de Barthes ? Je ne sais pas… Je doute qu’il soit possible d’en savoir beaucoup plus sur les rédacteurs effectifs, mais tu as raison, il y a sûrement collage de différentes plumes.
Dans les travaux de cette commission provisoire, et même s’il n’en était pas membre, je crois qu’un rôle important était joué par René Marzocchi, qui avait été élu directeur d’études en économie, mais qui était également un administrateur, donc, en quelque sorte, le pendant ou l’équivalent – sans la même « surface » internationale – de Clemens Heller pour Braudel. Je ne sais pas s’il a laissé des traces5. C’était un homme fort sympathique et qui a sûrement été moteur dans ces négociations, parce qu’il connaissait très bien les rouages tout à la fois de l’État et de l’École6.
Patrick Fridenson : Sur le sujet du « présent », fortement affirmé dans la seconde partie, Jacques Le Goff était lui-même, comme personne, très actif « au présent ». Les circonstances de ma vie professionnelle m’ont mis en contact pendant plusieurs années avec la RATP. Le Goff a été un président très activement présent, justement, du comité de sciences sociales lié à la RATP et aux transports parisiens. C’est un nouveau jeu de miroir qui s’ajoute à ce que tu as mis en lumière. Le « présent », c’était une façon effectivement de parler aux décideurs et aux financeurs, mais c’était aussi une des dimensions de cet homme qui, certes, voulait un très long Moyen Âge, mais qui voulait aussi du présent.
Roger Chartier : Oui, il ne faudrait pas interpréter mes propos comme l’indication d’une sorte d’hypocrisie, ou de couverture dans l’insistance mise sur la recherche des réalités et mutations du présent. Il y a un engagement réel. D’ailleurs, Furet reprendra la même idée. L’École, c’est l’étude du présent, avec une conviction de la dimension publique de l’École, contribuant à des décisions sur l’organisation du territoire, sur le développement, sur une nouvelle pensée économique. Et il y avait, de plus, ce premier giscardisme qui se voulait novateur, ou réformateur, qui ne voulait plus de l’apathie dénoncée par Braudel et qui donc faisait alliance, peut-être curieusement, avec des contenus de savoirs généralement portés par des chercheurs, des directeurs d’études ou maîtres de conférences qui n’étaient pas particulièrement conservateurs.
Pierre-Antoine Fabre : Je prends brièvement le relais et je redonnerai ensuite la parole à Patrick pour une dernière question. D’abord deux remarques. La première, c’est que, pour ce qui concerne le rapport à Barthes, pèsera la confrontation entre le texte de 1972 sur la réforme du troisième cycle et celui de 1975. Nous y reviendrons avec Tiphaine Samoyault. Du côté de l’économie et la justice, je me demandais, dans ce qu’on va appeler « le texte de Le Goff », qui était cet auteur célèbre qui avait pu définir « la raison comme étant seulement l’ensemble des gens raisonnables ». Et je me suis demandé si l’auteur célèbre était John Rawls.
Patrick Fridenson : Oui, cela serait à rapprocher de Kolm, que j’évoquais plus haut, sur la rationalité économique des acteurs.
Pierre-Antoine Fabre : J’aurais aussi deux questions. La première me ferait revenir au document de 1958, au sujet d’un passage sur lequel tu n’as pas complètement glosé, dans lequel Braudel note que l’université, volontiers « progressiste » sur le plan politique, est intellectuellement conservatrice. Cette rapide formulation m’a vraiment intéressé, concernant la possibilité d’en renverser le miroir par rapport à Braudel, qui n’est pas connu pour son progressisme politique mais qui entend fonder cette nouvelle faculté… Mais d’abord que désigne Braudel par ce progressisme politique de l’université, auquel il oppose une modernité intellectuelle qui passerait, et qui est peut-être passée, par une certaine forme d’émancipation par rapport au progressisme politique ?
Roger Chartier : L’université, pour Braudel, c’était deux choses différentes. D’une part, un conservatisme intellectuel et disciplinaire contre lequel tout le projet des Annales dès 1929, puis celui de la VIe section de l’EPHE en 1947, s’était construit. Mais, d’autre part, socialement ou sociologiquement, il y a dans les années 1950, des chercheurs ou des professeurs communistes, en plus grand nombre qu’auparavant, il y a le rôle des syndicats, il y a un engagement des étudiants. Peut-être Braudel vise-t-il à faire d’une pierre deux coups, contre le conservatisme intellectuel et contre un progressisme politique qu’il dissout dans ce conservatisme. Un double establishment qui demandait des réformes de structure.
On pourrait d’ailleurs revenir de ce point de vue à la référence à l’Union soviétique dont on ne savait trop que faire tout à l’heure et que l’on pourrait comprendre comme une prise à revers : il y a peut-être en URSS, semble indiquer Braudel, autre chose que le marxisme-léninisme, par exemple, les mathématiques sociales.
Pierre-Antoine Fabre : J’avais une autre question sur le texte de 1975. Quelque chose qui m’a beaucoup frappé concernant ce que tu appelais cette sorte d’absence de l’histoire ou de présence fantomale à dans le filigrane des sciences humaines. Mais il y a ce programme sur les archives orales des sciences humaines en France, dans son point B où l’on tombe sur quelque chose qui est le projet de rassembler les matériaux nécessaires à l’histoire du mouvement scientifique et intellectuel connu sous le nom d’École des Annales. L’histoire est donc bien convoquée ici, mais elle l’est à travers une institution spécifique, qui est l’École et la revue des Annales. Elle est, d’une certaine façon, rattrapée par le présent à partir des Annales.
Roger Chartier : Oui, c’est en quelque sorte un passé au présent. Mais il n’y a aucun moment, dans l’ensemble du programme, dans lequel on retrouverait les Annales afin d’indiquer des recherches proprement nouvelles. Beauté d’une absence, présente comme tradition. Et la seule démarche proprement historique qui est mentionnée, tu as raison, est celle de l’écriture de l’histoire d’une histoire. C’est en effet symptomatique, d’autant plus que c’est justement dans ce paragraphe qu’on retrouve le couple sciences sociales et sciences humaines.
Pierre-Antoine Fabre : Patrick, à toi la parole pour une dernière question.
Patrick Fridenson : Oui, je vais y venir. Mais je voudrais d’abord préciser un point, qui m’est revenu dans notre conversation et qui ajoutera peut-être quelque chose. Mon vieil ami Jean-Yves Mérindol, avec lequel Pierre-Antoine Fabre travaille à une histoire du Campus Condorcet, s’est lancé depuis quelques années dans une vaste histoire de l’enseignement supérieur en France. Et il explique à partir d’autres documents le contexte du document de 1958 que tu as commenté. Ce projet de nouvelle faculté se heurte à deux obstacles principaux et non pas à un seul, comme on pouvait le dire tout à l’heure. Le premier, c’est Pierre Renouvin, qui représente tout à la fois la vieille histoire et la Sorbonne (il s’est opposé à l’entrée de Braudel en Sorbonne) et qui représente aussi « Sciences Po ». Et tous ce monde-là ne veut pas d’une faculté des sciences sociales « coiffée », comme tu l’as relevé, par la VIe section. L’autre groupe, depuis l’intérieur de la VIe section elle-même, c’est celui des économistes et parmi eux de François Perroux, qui considèrent le projet Braudel comme, je cite, une « vue de l’esprit ». Le projet tombe, mais il reste un appui de Braudel, le directeur de l’enseignement supérieur Gaston Berger. Et quelque chose va prendre entre le Collège de France, « Sciences Po », et la VIe section : ce sera la Maison des sciences de l’homme. Mais Braudel est têtu. Et il tentera de profiter du grand éclatement de la Sorbonne après 1968 pour créer une faculté des sciences sociales à Antony, avec deux hommes qui sont très proches de lui, Alain Touraine et Marcel Roncayolo7. Et autant Vincennes et Dauphine vont réussir dans les créations issues de 1968, autant, pour des raisons que je ne connais pas, Antony ne se fera pas. Donc, pour lui, ce projet avait quand même la guigne.
Ma dernière question serait la suivante. Tu es intervenu il y a quelques années déjà dans divers séminaires, dont le mien, et dans d’autres lieux, sur le passage de l’écrit à l’écran8. Pourrait-on en tirer le sentiment qu’aujourd’hui la vocation de l’École des hautes études pourrait être d’étendre son territoire à l’écriture électronique ou à l’intelligence artificielle ?
Roger Chartier : Ce qui est frappant aujourd’hui, c’est qu’il y a, sinon une accélération de l’histoire, tout au moins une aggravation de l’anxiété, ou de la préoccupation, ou de l’enthousiasme pour ce qui est considéré par certains comme une révolution à l’intérieur de la révolution, autrement dit l’intelligence artificielle comme une révolution à l’intérieur du monde digital, celui de la création d’internet, du web et de toutes les technologies les ont accompagnées. Pour une raison évidemment fondamentale, qui est que ces technologies digitales renvoient l’homme social à des catégories qui sont celles d’une intentionnalité individuelle, d’une production originale ou répétitive, d’une propriété intellectuelle. Or l’intelligence artificielle est une rupture sur ces trois points, puisque les créations sont celles d’une machine, donc sans intervention d’une instance humaine, puisque, ensuite, cette production n’est plus définie par des critères d’originalité, mais justement par la possibilité d’une mobilisation de ce qui est déjà là, et enfin puisque la propriété intellectuelle s’y trouve mise en question, tout à la fois par l’appropriation des textes ou images qui constituent les bases des données mobilisées par l’intelligence artificielle générative et par la propriété de ce qui est produit par cette intelligence artificielle. Donc, si je ne sais pas si le mot « intelligence » est bien choisi, « artificielle » l’est en tout cas, en ce sens qu’il y a un effacement des agents humains à tous les moments, dans toutes les modalités de la production des textes, des images et des sons. Les machines ont récemment composé la dixième symphonie de Beethoven...
Si l’on suit le texte de Le Goff, l’une des urgences dans le rapport au présent d’une institution comme l’École est bien celle-ci. Il y a des collègues qui s’en préoccupent, bien sûr, mais il y a aujourd’hui une rupture qui rend totalement obsolètes les travaux que tu rappelais tout à l’heure, menés dans les années 2000. Les écrans dont je traitais alors, étaient des écrans d’écrits qui étaient le résultat d’une production humaine. Nous sommes maintenant devant des situations totalement différentes. Le supplément, pour revenir encore ici à Derrida, ce serait une nouvelle technologie détruisant ce à quoi elle a été ajoutée. Alors oui, je pense que tu as raison. C’est là une urgence de la réflexion, à conduire avec des ceux qui maîtrisent ces techniques et qui ont une compréhension interne de ces phénomènes pour mieux comprendre les enjeux épistémologiques, juridiques, sociaux, historiques, qui sont ceux de cette révolution dans la révolution.
Pierre-Antoine Fabre : On pourrait presque d’ailleurs ajouter, si l’on situait cette proposition dans la continuité des textes qu’on a lus aujourd’hui, qu’il y a aussi, d’une part les fondements narratifs de toute une partie de l’intelligence artificielle, cette énorme masse de récits par rapport auxquels elle fonctionne, et qui renverrait à tout ce qui a été un travail de l’école en matière de narratologie, et qui fait partie de la longue durée de ces recherches. Et d’autre part, la mathématique, puisque la question de la probabilité est elle aussi centrale dans les constructions narratives liées à l’intelligence artificielle. Le rapport de la manipulation narrative et du calcul des probabilités est au cœur de l’originalité spécifique de l’intelligence artificielle sous ces formes actuelles et toute une tradition intellectuelle de l’école serait donc mobilisable là aussi.
Roger Chartier : Oui, et il y a d’ailleurs eu un intérêt très précoce de l’École pour la technologie digitale sous ces formes anciennes. Je me souviens d’un spécialiste, Jacques Perriault, qui avait introduit très tôt, on le voit dans les affiches de l’école, des enseignements sur ce qu’on appelle maintenant le « numérique9». C’est d’ailleurs aussi le moment où François Furet et Emmanuel Leroy-Ladurie, séjournent à l’université de Ann Arbor, où se trouvent les premiers grands computers utilisés pour des études historiques massives de données quantitatives. Tout cela semble aujourd’hui de l’artisanat médiéval, mais participait alors d’une interrogation de l’École sur les nouvelles formes de conservation et d’organisation des données lorsqu’elles celles-ci deviennent des données numériques. Il faudrait retrouver le fil de cette trajectoire qui pourrait conduire au présent, avec cette nécessité absolue de se confronter aux défis de l’« intelligence artificielle » que je continue de considérer comme un oxymore. Car si l’on considère que l’intelligence n’est pas simplement la possibilité d’un raisonnement logique, mais celle d’un ajustement à la spécificité d’une situation (ce que l’on trouve dans toutes les définitions des dictionnaires), les réponses de ChatGPT ou de ses semblables ou apparentés ne relèvent en aucune manière de cette possibilité. Et ce, par définition, puisque c’est la mobilisation des bases de données avec tous leurs biais, racistes, xénophobes, machistes, etc., qui tiennent lieu de situations. Si l’on définit l’intelligence dans la manière du XVIIe siècle, à la manière du Siècle d’Or espagnol, de Baltasar Gracián par exemple, comme une forme d’ajustement subtil à une situation unique, alors, effectivement, l’intelligence artificielle est un oxymore. Mais la formulation de ces nouveaux problèmes permet, à coup sûr, à cette célébration du « cinquantenaire » de déboucher sur notre présent.
Pierre-Antoine Fabre : Tout en revenant au moment américain que nous avons retrouvé autour du document Braudel de 1958.
Roger Chartier : Oui, en effet !
Notes
1
Voir en particulier Jacques Derrida, De la grammatologie, Paris, Seuil, 1967.
2
Fernand Braudel, « Histoire et Sciences Sociales. La longue durée », Annales. Economies, sociétés, civilisations. 13e année, N. 4, 1958 p. 725-753.
3
Sur Clemens Heller, fondateur avec Braudel et premier directeur de la Maison des sciences de l’homme, on pourra lire en complément de cet entretien Patrick Fridenson, « Clemens Heller et les échanges transatlantiques dans le domaine des sciences sociales et des institutions de la recherche », Relations internationales, 181, 2020, p. 65-85 et Clemens Heller, imprésario des sciences humaines, sous la direction de Hinnerk Bruhns, Joachim Nettelbeck et Maurice Aymard, Paris, Editions de la Maison des Sciences de l’Homme, 2017.
4
Tiphaine Samoyault, spécialiste de Barthes et qui a lu le texte de 1975 après l’entretien qu’elle nous a accordés et que l’on trouvera joint ici, a exprimé ses doutes sur cette hypothèse. Mais nous avons choisi de la maintenir, car elle souligne un trait structurel de ce texte, sa collégialité probable alors même que Jacques Le Goff est retenu comme son « auteur ». Il en va ici d’un aspect très révélateur du travail de ce moment, dans une institution en gestation.
5
Il en a laissé. Un riche fonds Marzocchi, inventorié par Yamina Irid en 2008, est conservé par les Archives de l’EHESS.
6
Cette commission était composée, entre d’autres collègues de la VIe Section, de Marc Barbut, Barthes, Joseph Goy, Louis Velay, pour la séance du 27 juin 1974 qui précède de peu le décret de création de l’EHESS.
7
On pourra consulter avec profit les rapports de Touraine (en 1968, issu du Fonds Louis Velay) et de Roncayolo (en 1976, issu des comptes rendus du Conseils Scientifique) dans les archives de l’EHESS.
8
Voir en particulier sur ce sujet Roger Chartier, « L’écrit sur l’écran. Ordre du discours, ordre des livres et manières de lire », Entreprises et Histoire, 43, 2006, p. 15-25.
9
Sur l’affiche de 1975 figure en effet sous le nom de Jacques Perriault, « Informatique et sciences sociales. Moyens modernes de communication et de calcul : études technologiques et socio-économiques ».